EXCÉDÉS DES GRANDS EXCÈS

Depuis 2002, le « comportement au volant » des Français n'a cessé de s'améliorer, ce qui se traduit par un nombre de mort sur les routes en constante diminution.

Les conducteurs responsables sont devenus majoritaires et ils n'admettent plus de se voir doubler sur la route par une minorité d'irréductibles, surtout, lorsque ceux ci s'approprient la chaussée à coups de klaxon, appels de phare ou autres signes extérieurs de suffisance.

Le ventre mou du parlement plaide complaisamment en la faveur de ces « cols blancs » de l'insécurité routière qui se disputent la voie de gauche des autoroutes avec les « go fast » de tous les trafics.

L'exemple le plus significatif de ces atermoiements législatifs concerne le délit de grande vitesse, article L. 413-1 du code de la route qui vise les conducteurs ayant dépassé de plus de 50 km/heure la vitesse autorisée.

Ce délit n'est constitué qu'en cas de récidive dans un délai de trois ans, et une fois la première condamnation rendue définitive, c'est à dire après épuisement de tous les recours.

Il faut savoir cependant que le premier de ces excès de vitesse est une contravention de 5ème classe dont la condamnation figure certes au casier judiciaire (article 768 du code pénal), mais qui ne fait pas partie des condamnations transmises au sommier de police technique du ministère de l'intérieur (article 773-1 du code pénal).

Par ailleurs ces contraventions de 5eme classe, à l'inverse d'autres, ne sont pas autorisées à figurer au Système de Traitement de l'Information Criminelle (STIC), le fichier d'antécédents accessible aux forces de l'ordre.

Les policiers et gendarmes n'ont donc pas la possibilité d'établir à leur niveau la récidive et donc le délit.

Dommage, car l'article 28 de la Loi d'Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure (LOPPSI II) de décembre 2010, permettait enfin la confiscation obligatoire du véhicule du conducteur propriétaire, qui aurait commis un délit de grand excès de vitesse.

C'est un peu comme « sauter pour mieux reculer », que d'aggraver les sanctions des infractions qui n'ont aucune chance d'être constatées.

Surtout que la confiscation obligatoire du véhicule doit avoir été prononcée dans le délai du flagrant délit, soit sept jours. (article L. 325-1-2 du code de la route)

La Sécurité Routière, elle même dans son bilan 2008, est incapable de citer le nombre d'infractions liées au délit de grand excès de vitesse. Ce qui fait dire à certains, hostiles à cette loi, que sur les 17 200 contraventions de 5eme classe décernées à ce motif en 2007, pratiquement aucun des conducteurs n'aurait récidivé.

On attend de la Sécurité Routière qu'elle nous communique depuis 2004, le nombre de délits de grands excès de vitesse effectivement relevés (article  L413-1 du code de la route et article 132-11 du code pénal), c'est à dire le nombre de récidives effectivement constatées de la simple contravention de grand excès de vitesse (article R413-14-1 du code de la route).

On attend également que nous soit communiqué le nombre de confiscation(s) de véhicule(s) effectivement prononcée(s) depuis 2004, dans le cadre de la simple contravention de grand excès de vitesse dont il faut rappeler tout de même qu'il s'agit d'un excès de 50 km/heure au dessus de la limite autorisée.

Pour que la loi sur la sécurité routière soit plus performante, il aurait simplement fallu que le délit de grande vitesse soit constitué dès la première infraction. Rappelons que le dépassement de plus de 50 km/heure de la vitesse autorisée n'est pas consécutif à une faute d’inattention et que sur autoroute, compte tenu de la tolérance,  le grand excès de vitesse est établi à partir de 188 kilomètres par heure.

Cette disposition de bon sens aurait permis que le véhicule du mis en cause soit immédiatement et obligatoirement confisqué et que lui même puisse être immédiatement traduit devant un tribunal correctionnel.

Il faut savoir par ailleurs que la contravention ne peut légalement être constatée qu'en flagrant délit, tandis que le « délit »  quant à lui peut être constaté également dans le cadre d'enquêtes préliminaires ou même sur commission rogatoire, ce qui aurait permis aux forces de l'ordre, sans prendre de risques, de constituer des dossiers mieux étayés que dans le cadre d'une simple contravention.

De quoi par exemple dissuader les personnes qui roulent excessivement vite dans des limousines, avec des plaques luxembourgeoises attribuées à des sociétés « artificiellement basées au Luxembourg ».

De quoi dissuader aussi les conducteurs étrangers ou de véhicules aux plaques étrangères qui totalisent 25 % des contraventions pour excès de vitesse sur notre territoire et jusqu'à 40 % en période estivale.

De quoi dissuader définitivement les participants des rallyes « Cannonball », « Torpedo » ou « Gumball », qui périodiquement se font fort de traverser la France à des vitesses souvent supérieures à 200 km/heure.

De quoi dissuader également les conducteurs des véhicules de société que les dirigeants ne sont pas tenus de dénoncer lorsqu'ils ont commis un excès de vitesse.

De quoi dissuader finalement peut être un peu trop de monde au goût des lobbies automobiles, jusqu'à peut être expliquer les frilosités parlementaires.

Le « comportement » au volant des usagers de la route est « déterminé par l’environnement et l'histoire des interactions de l'individu avec son milieu ». Le curseur ne bougera plus tant que des « stimulus négatifs » inciteront l'usager à ne plus respecter les règles.

La majorité des conducteurs ne demande qu'à être « exemplaire », pour la minorité restante, il reste « l'exemplarité de la peine ».